Connaît, dit-il, que parce que tout en bas est comme tout en haut, ainsi il y a une politique dans l’occulte, comme notre politique terrestre et matérielle ; qu’il y a une diplomatie transcendante. L’occultisme, que nous avons par symboles et par ombres, n’est pas l’expression d’une vérité, mais d’une opinion transcendante. Le véritable chemin de la Vérité ne se voit que lorsque nous connaissons le principe fondamental, que nous devons utiliser pour déshabiller l’illusion primaire.

« Et quel est ce principe fondamental ?

  C’est ceci : DANS L’ABSOLU IL N’Y A NI BIEN NI MAL. Bien et Mal sont des termes créés pour symboliser des choses qui, en elles-mêmes, ne contiennent ni bien ni mal. L’occultisme est une politique de la Volonté absolue, dans laquelle tout ce qui est Intelligence apparaît comme mal, parce qu’opposé à ses intérêts transcendants ; mais l’Intelligence n’est un mal que pour ceux qui l’ont pour ennemie.

Dans les mythes anciens, il y a des traces de dissidence primitive. On dit que l’ange rebelle est Lucifer, le porteur de lumière. Pourquoi la Lumière est-elle identifiée au Mal ? Parce que ce qui l’appelle le Mal, c’est l’Obscurité. Il illumine et dissipe les Ténèbres primordiales, le Chaos primordial. La Lumière est mauvaise parce qu’elle détruit constamment le Monde, dont la substance est l’Obscurité.

Le Dieu qui a créé le monde n’est pas le Soi. Il y a plus de mondes que Dieu n’en a créés. Il y a plus de dieux que de Dieu. Il y a plus de Réalités que de Réalité naturelle ou surnaturelle.

Le mal est de deux sortes. Il y a le mal qui est l’ennemi de la substance du Monde : c’est l’Intelligence, qui est la vision-du-monde-de-l’extérieur, principe de fuite du monde vers l’Au-delà-Infini. Et il y a le mal qui est l’ennemi du monde, et non de sa substance, et c’est le mal pur et simple - le mal du criminel, et parfois aussi du saint, le mal de celui qui veut détruire les autres pour exister, ou pour détruire les autres, pour que les autres existent.

Au-dessus de tous les dieux et de tous les mondes, impersonnels, ni bons ni mauvais, l’Intelligence Pure, dénuée de tout attribut, est le DESTIN. Chaque monde, chaque univers, a son créateur Dieu, et son Bien et son Mal, qui sont la tendance à revenir à Dieu, et la tendance à s’éloigner de Lui.

La révolte des anges n’est pas née d’une volonté de désobéir au tout-puissant. Contre le Tout-Puissant, il ne pouvait y avoir de révolte. Elle est née de la tendance vers la Vérité, de voir, au-dessus du Dieu qui les a créés, l’âme du monde auquel ils appartiennent, le DESTIN. C’est pourquoi le premier ange rebelle s’appelait Lucifer - le Porteur de Lumière.

Au-dessus de l’envie de fusionner avec les produits de Dieu, il y a, en fait, l’envie mystique de fusionner avec Dieu, qui est la base de (presque) tout l’occultisme. Mais au-dessus de cette même envie se trouve l’envie d’échapper à Dieu et au Monde - l’envie de fusionner avec le Destin.

La révolte des anges n’est pas la même chose que la désobéissance d’Adam. Les anges ont voulu fuir Dieu vers le Destin, de la Pure Volonté vers la Pure Intelligence, de la Pure Personnalité vers le Pur Impersonnel. Adam voulait fuir Dieu vers les produits de Dieu. La tentation à laquelle il succomba, dit l’Ecriture, fut par la femme, et sous l’impulsion du Serpent.

Le Monde a été créé par l’Emotion, qui est la logique de la Volonté (le Logos du Monde) ; c’est pourquoi la Deuxième Personne de la Trinité est décrite à la fois comme Émotion et Logos. Adam et Eve sont une Volonté et une Emotion séparées ; le péché était de vouloir être comme Dieu, de les unir. Elle a donné l’inversion des forces, car dans notre monde humain, l’Emotion précède la Volonté. L’émotion a été tentée par la Conscience (le Serpent). L’émotion sans Volonté, comme Dieu l’a voulu, c’est la Vierge. Le fils de la Vierge, c’est-à-dire le produit de l’Emotion sans Volonté, est donc le Fils de Dieu.

Dans tout cela, où est l’Intelligence ? L’INTELLIGENCE N’EST PAS DE CE MONDE, ELLE EST ÉTRANGÈRE À LA SUBSTANCE DU MONDE : ELLE VIENT DU DESTIN, SUPÉRIEUR AUX HOMMES ET À DIEU.